ELLE
a des timidités de petite fille. Un tremblé de tout l’être
qui traduit ses doutes et sa pureté. Elle est rare, Marie
Rivière. Une comédienne profonde, sensible, touchante. Une
«rohmérienne», entrée dans le monde du maître en lui écrivant
après avoir vu L’Amour l’après-midi. Elle est dans
nos coeurs la flâneuse du Rayon vert et si elle a tourné bien
d’autres films avec Éric Rohmer, tel Conte d’automne
et cet autre, à découvrir, Le Canapé rouge, un film
court non encore distribué mais qui sera projeté ce dimanche
dans le cadre d’un cycle à la Cinémathèque*, Marie Rivière
est en ce moment sur l’une des scènes du Lucernaire avec Dans
la peau d’Élisa de la Québécoise Carole Fréchette, spectacle
qu’elle avait créé la saison dernière dans une petite salle
du quartier Arts et Métiers, avec un unique partenaire, Jonathan
Hume, dans une mise en scène d’une Américaine de Paris très
sensible, Carole Anderson.
Un très joli moment. Les paroles d’une femme, adressées à ce jeune homme, dans la nuit du théâtre et de la vie. Histoires d’amour comme des onguents de composition mystérieuse. Histoires simples ou très romanesques. Tout ce que touche Marie Rivière de sa voix grêle et entêtante, avec cette manière d’articuler précautionneuse, devient inoubliable. Il y a des interprètes dont la seule présence bouleverse. Telle est Marie Rivière, dans sa robe d’été, délicate et laissant affleurer l’éternelle petite fille qui palpite sous sa peau transparente.
Il y a dans sa manière d’aborder les personnages, de transmettre l’encre même des textes une lumineuse évidence. Elle respire naturellement à grande hauteur. Elle est simple, quotidienne, mais elle est dans l’éther de ceux qui voient toujours au-delà et se cognent parfois aux parois. Ne ratez pas ce moment de grâce.
Théâtre
du Lucernaire, à 19 heures du mardi au samedi. Tél. : 01 45
44 57 34.
* Cinémathèque française, à 14 h 30,
dimanche 24, «Barricades mystérieuses», avec aussi les films
de François
Ozon et Eugène Green.